A l’heure qu’il est, où la planète entière a eu vent de la banane à 120K$ scotchée au mur du stand de Perrotin à Basel Miami, il est temps de revenir sur la semaine de l’art à Miami : les résultats et coup de coeur ! Avec ses 269 exposants et ses 80 000 visiteurs chaque année, Art Basel Miami maintient sa place primordiale dans l’éventail infini de salons ayant lieu partout dans le monde. Le salon a d'ailleurs grandement contribué à l’essor de la capitale de la Floride depuis sa première édition il y 18 ans. C’est pourquoi l'événement est financé par des acteurs privés, des marques de luxe par exemple profitant de la venue d’artistes pour faire des collaborations, ou encore la ville de Miami qui a augmenté son budget alloué pour faire de cette semaine un rendez vous unique pour un public américain.
En effet, cette année le salon accueilli davantage de participants américains, autant du nord que du sud. La galerie d’origine française Lelong témoigne de la baisse des exposants européens et asiatiques. La galerie ayant une entité à New York et une à Paris peut témoigner de l’évolution du salon puisqu’elle y participe depuis sa création en 2002. Ils confiaient au Quotidien de l’art avoir vendu pour 150k$ une oeuvre de Kounellis, une à 80k$ de Leonardo Drew et quelques une de Samuel Levi Jones. Afin de fidéliser sa clientèle américaine une autre galerie française, Templon, a choisi d’exposer des artistes du même continent : George Segal, Jim Dine ou encore Philip Perstein avec pour thématique commune “le corps”. Il ont cédé des oeuvres de Omar Ba entre 30k$ et 120k $, ajoutées à un grand format Kehinde Wiley pour 250k$.
Bien sûr, les transactions des multimilliardaires se sont à nouveau regroupées sur les stands des «blue-chip»: deux Rauschenberg furent cédés pour 1M$ chez Pace dès le premier jour et une oeuvre de Agnes Martin pour 1,5M$ le dernier ; une toile de Bridget Riley et Chris Ofili fut vendue pour 1,5M$ et 1,1M$ respectivement chez Zwirner ; un Baselitz fut cédé pour 3,5M$ chez Ropac ; un quadriptyque Carmen Herrera à 2,5M$ chez Lisson et un David Hammons à 2,4M$ chez Hauser & Wirth. Le dernier jour, Hammer a vendu un Chagall pour 2M$ et enfin, pour revenir à la banane de Cattelan dont nous avons déjà évoqué le prix plus haut, l’oeuvre composée de trois pièces les deux premières furent achetées par une institution espagnole et un collectionneur chinois. La dernière quand à elle fut savourée par l’artiste américain David Dutana lors de la performance donnée sur le stand de Perrotin.
Continuant sur la tendance adoptée à la FIAC ou à la Frieze de rendre l’accès au salon plus équitable, Art Basel a réduit ses prix pour des galeries émergentes nous permettant de découvrir des plus petites galeries ayant de très bons artistes.Par exemple chez Mariane Ibrahim où la fièvre africaine a encore frappé, la galerie basée à Chicago présentait un solo show du peintre Ghanéen Amoako Boafo pour des prix allant de 25K à 40K$. La galerie Maria Bernheim venue de Zurich montrait quant à elle les toiles mélancoliques de Kyle Dunn qui ont séduits des acheteurs chinois entre 5K$ et 15K$ dès le premier jour. L’entité mexicaine de Gaga Fine Arts a fait l'éloge de jeunes créateurs tels que Vivian Suter ou Anna Uddenberg séduisant les aficionados espagnols et asiatiques. Un autre solo show à la galerie brésilienne Bergamin & Gomide qui a choisi de mettre à l’honneur son pays en présentant les sublimes peintures de Luciano Lorenzato.
Enfin, les Bananes de Cattelan, “Comedians”, ont battu des records de prix mais surtout d’audience puisque Perrotin a même dû retirer ses cimaises pour éviter que l’afflux de visiteurs n’abîment les pièces des stands voisins. Pour la petite histoire de l’oeuvre, celle ci fait allusion aux gags de la comédienne Lucile Bluth se moquant des riches ne sachant même pas le prix d’une banane. Bien sûr le but de montrer cette performance au beau milieu d’un des salons les plus chers du monde et basé dans la capitale du show off était pour Cattelan de questionner la valeur des objets matériels.
Basel Miami participe pleinement à faire de Miami un rendez-vous pour les amateurs d’art et notamment de street art. Wynwood, par exemple, un ancien quartier ouvrier, est devenu très prisé, notamment grâce aux nombreuses fresques de grands artistes. Le phénomène semble s’étendre à l’ouest, du côté d’Allapattah, où a déménagé le Rubell Museum (auparavant nommé Rubell Family Collection) inauguré lors de l’évènement. Musée pouvant se vanter des quelques 7200 oeuvres signées par quelques uns des artistes Américains les plus connus tels que Jeff Koons, Cindy Sherman ou encore Keith Haring.
S’ajoutant à l’enchaînement de fêtes, de rencontres, d'événements, de lancements de produits ou encore de performances générées autour de ABMB, les foires Satellites permettent de compléter l’offre de Basel Miami en créant des univers différents.
Juste à côté de Basel Miami, il y avait Design Miami, qui a accueilli 15 exposants offrant des meubles et d'objets décoratifs de haut niveau. Travaillant à l'élargissement de la gamme des objets exposés, M. Chen, le conservateur, nous a recommandé d’attacher une attention particulière aux œuvres cérémonielles africaines de Kerr Fine Art et aux pots en céramique médiévaux de la galerie Erik Thomsen au Japon.
Scope Miami aspirait encore une fois à initier les nouveaux collectionneurs en présentant la crème des artistes contemporains émergents.
Heureusement les organisateurs de Pulse ont prévu la fatigue des visiteurs. Après avoir acheté quelques bananes en or, les visiteurs pouvaient, en déguster dans des cocktails ou des tapas à des prix plus abordables - pas gratuits non plus! En effet, la thématique “The Calm in the Palms” invitait les visiteurs à profiter de la sublime maison en bord de mer sur Indian Beach Park où se déroulait le salon pour se détendre et se sont vu offrir une programmation très latino.
Untitled fut comme toujours très apprécié par les collectionneurs à l'affût d’artistes émergents. Les amateurs ont pu se réjouir de l’offre d’artistes africains et latino américains comme par exemple les œuvres de la photographe sud-africaine Zanele Muholi et celles d’autres artistes émergents dont le peintre ghanéen Patrick Quarm et la récente diplômée du Pratt Institute Alanna Fields. Les artistes afro-américains se sont avérés très appréciés et leurs ventes ont explosé d’une façon générale sur le marché de l’art.
Enfin, NADA, terrain accueillant les artistes et galeries les plus à même de poursuivre leurs aventures à Miami sur les terres de ABMB a encore très bien marché! En effet les collectionneurs ne souhaitant pas dépenser un demi million par oeuvre pouvaient se réjouir de prix allant de 10k$ à 50k$.
Profitant de son emplacement stratégique, au carrefour de deux Amériques, avec vue sur mer, la semaine de l’art à Miami dont Art Basel forme le noyau, est décisive pour les marchands du monde entier. En effet l'événement ne se fatigue pas puisqu’il remplit les cases de qui fait un salon réussi. A savoir, pour les collectionneurs la possibilité de trouver des pièces auxquelles ils n’auraient pas accès, et celle pour les marchands de rencontrer des acheteurs impossible à rejoindre sinon.