Le Art Basel rapport 2019 - Partie 1

Notre rapport favoris à propos du marché de l’art est enfin sorti ! Découvrez les points à retenir ainsi que notre opinion sur le Marché mondial de l’art en 2018 partie 1.

1- Le marché mondial de l’art en 2018

En 2018, le marché mondial de l’art a atteint $64,4 milliards en ventes, avec un volume de 39,8 millions de lots vendus - le deuxième record depuis 10 ans. Depuis 2008, l’industrie a généré un taux de croissance annuelle de plus de 9%. Les États-Unis, le Royaume-Uni et la Chine restent les marchés les plus importants représentant 84% de la valeur totale mondiale. Ceci est le résultat d’une forte augmentation des ventes réalisées par les galeristes ainsi que le marché en ligne. (En savoir plus sur les perspectives du marché en ligne ici).

A- Les États-Unis

Les ventes aux États-Unis ont atteint $29,9 milliards en 2018, record le plus élevé à ce jour. Le peu de restrictions sur les procédures d’imports et d’exports ainsi que le style de vie bourdonnant New Yorkais ont créé un écosystème parfait pour une scène artistique dynamique. Comme l’auteur Jean Gabriel Fredet l’a déclaré dans son livre “ Requins, caniches et autres mystificateurs” ,les États-Unis ont réussi à créer leur scène artistique grâce à leur ouverture d’esprit face à l’art d’après guerre et à l’art contemporain. L’identité multiculturelle des États-Unis a permis l’acceptation de nouvelles tendances artistiques sans préjugés, chose que l’Europe et l’Asie n’ont su faire. 

B- Le Royaume-Uni & l’Europe : la question du Brexit ?

Étonnamment, bien que le Brexit crée un climat d’incertitude, Londres reste la scène artistique la plus importante d’Europe avec des ventes en hausse constante de 8% d’année en année depuis 2017. Contrairement aux idées reçues, le marché de l’art britannique, avec ou sans Brexit, restera un marché important. Le Royaume-Uni a toujours agi en tant qu’entrepôt servant comme point d’entrée de vente à faible coût en Europe. Le marché de l’art Londonien a été construit sur sa rentabilité. Bien que les accords commerciaux entre le Royaume-Uni et l’UE soient complètement flous et bien qu’ils n’aient pas encore trouvé un terrain d’entente, la scène artistique londonienne ne souffrira pas du Brexit - du moins pour les grandes entreprises. À savoir, 85% de la valeur de l’art échangé depuis le Royaume-Uni ne se fait pas au sein de l’union européenne. Bien que la sortie du Royaume-Uni puisse être interprétée comme une opportunité pour des pays comme la France ou l’Allemagne pour rayonner en tant que hub artistique, ils auront certainement du mal à concurrencer le marché de l’art britannique (par ex. le Royaume-Uni aura la possibilité de réduire sa TVA à l’importation afin d’augmenter sa compétitivité). De plus, l’Europe se positionne comme étant moins attrayante que le Royaume-Uni en raison d’une réglementation excessive du secteur de l’art et de l’antiquité et d’une complexité fiscale excessive.  En effet, l’Europe a manqué à plusieurs reprises la chance d’être un marché de l’art prospère. Par exemple, une nouvelle réglementation sur l’importation des biens culturels de plus de 250 ans en provenance de pays non membres de l’UE a été mise en place il y a peu de temps ce qui intensifie la complexité des procédures d’importation, décourageant ainsi les échanges. Il existe donc un risque réel qu’une fois le Royaume-Uni sorti, le commerce de haute valeur d’art contourne tout simplement l’UE.

C - Asie

En ce qui concerne l’Asie, la Chine connaît une légère baisse dans ses ventes. Ceci est principalement dû à une offre limitée d’oeuvres de qualité combinée avec une réserve importante des acheteurs dans leurs acquisitions - les tensions commerciales avec les États-Unis et un sérieux ralentissement de l’activité économique chinoise.

Bien que le gouvernement chinois ait réduit la TVA sur ses importations à 1 % en 2018, il a été décidé d’imposer une tax nationale à 17 %, freinant tout stimulus économique. De plus, la guerre commerciale entre la Chine et les États-Unis qui ébranle le monde entier a créé un climat d’incertitude économique important. Bien que nous nous attendions à ce que les tensions commerciales se dissipent d’ici avril 2019, c’est aujourd’hui (juin 2019) que les tensions politiques sont au paroxysmes - nous pensons que cela aura certainement un impact sur la performance du secteur en 2019. 

2- Les galeries 

A- Résultats

En 2018, les ventes en galeries ont générées $35,9 milliards principalement grâce aux “blue-chip galleries”. À noter que les galeristes ont des points de vue mitigés sur la performance du marché avec un peu moins d’optimisme que les années précédentes. Les marchands d’art moderne ont, de loin, généré le plus de ventes cette année avec une croissance de 17% sur un an.  Ce segment est suivi de près par l’art contemporain. L’art décoratif et les antiquités bien qu’ayant de moindres valeurs commerciales, ont connu une hausse importante avec un taux de croissance de 18% d’année en année. 

B- Habitudes d’achat

La principale difficulté pour les galeristes reste de trouver de nouveaux acheteurs et cela principalement pour les oeuvres d’art haut de gamme. L’achat d’oeuvres d’art par simple “coup de coeur” n’existe plus, les vrais collectionneurs sont prêts à attendre des années pour trouver LA pièce - ceci n’est pas vrai pour tous les segments. Par exemple, la génération Amazon ou la génération Y ont des habitudes d’achat complètement différentes: plus impulsive et plus avant gardiste dans leurs acquisitions! Pour les Millenials, nous pouvons réellement parler d’un investissement passionnel qui se rattache à un aspect plus émotionnel. Une autre préoccupation des galeristes est aussi le grave manque de structure de financement et de facilité de crédit. Le marché est peuplé d’un très petit nombre d’entreprises qui réalise des profits extrêmement élevés, alors qu’une grande majorité peine à couvrir leur frais. Les investisseurs privés ainsi que les grandes subventions publiques sont les principales sources de financement. Malheureusement pour ces galeries, obtenir un prêt bancaire est quasi impossible et serait d’une aide importante vu la volatilité du marché. En effet, la marge de variation nette des galeristes se situe entre 10% et 30% de leur chiffre d’affaire. 

C- Fonctionnement

Les galeristes peuvent soit être propriétaires des pièces qu’ils vendent soit travailler sous commission ou vendre sous consignation. Il y a une demi-décennie, la structure la plus courante était semblable à une stratégie financière de Wall Street avec “acheter bas et vendre haut” - en d’autres termes acheter des oeuvres sous-évaluées et les revendre au prix fort! La majorité des marchands comptait sur les maisons de ventes comme moyen pour se procurer des oeuvres ”sous évaluées” et les revendre avec une forte marge à des collectionneurs privés. Cependant, de nos jours, ce type de stratégies n’est plus viable et est extrêmement limité du fait que les relations entre les différents acteurs ont complètement changé. En effet, aujourd’hui les maisons de ventes aux enchères et les acheteurs privés ont une relation plus forte que jamais. Ceci empêche les marchands de profiter d’un arbitrage et augmente “la transparence” du marché. 

3- Représentation des artistes et la question du genre

A- Représentation des artistes

Le marché de l’art peut être divisé en deux catégories: le marché primaire (première fois qu’une oeuvre est mise à la vente) et le marché secondaire (marché de revente). Le marché secondaire est le plus important en valeur et est celui où les meilleures ventes sont faites.  Les marchands travaillants uniquement dans le marché primaire génèrent moins de revenus comparé à ceux travaillant dans le marché secondaire. Le marché primaire a sa propre dynamique. En effet, en moyenne 42% de la valeur créée par une galerie est générée par un seul artiste. Ceci est principalement dû à un manque d’information par les acheteurs ce qui crée un risque significatif. En effet, le marché primaire est peuplé d’artistes moins établis, dont certains ne sont pas encore “validés” par le marché. Ceci joue un rôle central dans le développement des oeuvres d’un artiste ainsi que sa cote - le jeu de l’offre et la demande. Les contrats d’exclusivité de représentation sont devenus de moins en moins  populaires aujourd’hui. En effet le secteur primaire tente de se consolider en organisant des collaborations entre galeries afin d'accroître la visibilité d’un artiste. Le marché secondaire a un fonctionnement complètement différent. Par exemple la plupart des oeuvres proviennent de maisons de ventes aux enchères ou d’intermédiaires. Ces oeuvres sont plus facilement échangées grâce à leur liquidité. En effet, lorsqu’une oeuvre passe du marché primaire au marché secondaire cela signale que l’artiste a été ”validé’” par le marché - à noter que cela est extrêmement rare! Au cours des dernières années, les “blue-chip” galeries ont réalisé des résultats impressionnants alors que de nombreuses galeries ont du mal à survivre. Beaucoup pensent que ce phénomène est l’exemple même d’une antisélection - les galeries de premier rang ont le luxe de choisir leurs artistes.

B- La question du genre 

Dans l’ensemble, il existe d’importante inégalité entre les sexes en ce qui concerne la représentation des artistes féminins. Les femmes sont largement sous-représentés mais depuis la dernière décennie leur travail est de plus en plus reconnu.  Par exemple, il est mentionné dans le rapport Art Basel que le pourcentage de femmes participants à des expositions mondiales est passé de 25% en 2000 à 33% en 2018. Les inégalités entre les sexes au seins des galeries est aussi important. En effet les artistes féminins ont été fortement négligées en raison de leur manque de succès commercial. 

4- Les maisons de ventes aux enchères 

A- La dynamique du marché 

Le secteur des maisons de ventes est classifié par différentes gammes de prix. À savoir, plus de 50% de la valeur globale générée par le marché est générée par les 5 acteurs principaux: Christie’s, Sotheby’s, Poly Auction, China Guardian et Phillips. Christie’s et Sotheby’s ont un duopole sur le marché et réalisent 40% de la valeur.  Le reste du marché est peuplé d’acteurs de taille moyenne qui dominent les marchés locaux (exemple: ArtCurial en France ou Cambi en Italie). Les maisons de ventes aux enchères en plus de proposer une catégorie “Fine Art & Collectibles” à la vente offrent également une large palette de diverses pièces de luxe telles que de l’immobilier, des voitures, du vin, des bijoux ou des sacs à main. Sur une vente, une maison de ventes prend une commission entre 25% et 27%. Il existe deux types de ventes: les ventes privées et les ventes publiques. Les ventes privées sont réservées à un nombre limité de personnes. À noter, ce sont les ventes d’importantes collections familiales comme celle de Peggy Guggenheim ou de David Rockefeller qui sont les plus fructueuses! 

B- Résultats 

Les ventes aux enchères publiques ont réalisé $29.1 milliards. Les trois plus grands marché restent les Etats Unis, la Chine et le Royaume Uni. À eux trois ils représentent 88% des résultats. Aux États-Unis, les ventes aux enchères sont les plus performantes et continuent de connaître une croissance importante (augmentation de 18 % sur un an). Les ventes au Royaume-Uni sont restées cohérentes avec une croissance constante sur un an de 15%. Les résultats des enchères en Chine ont diminué de 9 %, avec de nombreux “buy-in” (stratégie de garantie où, si le prix de réserve n’est pas atteint, la maison de vente peut acheter l’objet pour son compte au prix garanti ou payer la différence entre le prix adjugé et le prix garanti à son client pour éviter un ravalement) . À noter qu’un “buy-in” a, une corrélation négative sur la valeur de la pièce ; dû à la loi de l’offre et de la demande.

C- Tendances artistiques

En 2018, les ventes d’après-guerre et d’art contemporain représentaient la moitié des résultats du marché des ventes aux enchères d’art, ce qui représente environ 7,2 milliards de dollars. L’art moderne est en deuxième position avec des résultats solides. Le secteur des impressionnistes/post-impressionnistes et des anciens maîtres a connu un déclin important en 2018.

August 28, 2019